L'art bourgeois d'imiter les kiliminis du Maroc

N’avez-vous jamais rêvé de ressembler aux kiliminis du Maroc ?

De Casa à Rabat sans oublier Kénitra, cette néo-beurgeoisie est jumelle à celle du XVIème.

• Parenthèse masculine: La fortune (presque cachée) des mecs du 16ème arrondissement

En effet, l’expression franco-marocaine « kilimini » – empruntée de la formule « qu’il est mignon » – est employée dans les conversations en darija pour nommer les héritiers de la très haute société du Royaume.

Cela signifie qu’ils appartiennent à une sorte d’aristocratie chérifienne (celle de l’argent).

Une journée dans la peau d’une authentique kilimini. En fin de compte, le kiliminisme ne serait-il pas un humanisme ? Voire même un Oummanisme ? (© Capture d’écran | Chaîne de Chaimaamswi sur YouTube | Date: 20 août 2025)

Francophones accomplis, la plupart d’entre eux ont fait leur scolarité au lycée Lyautey.

Adeptes du matcha, ils connaissent toutes les bonnes adresses ouest-parisiennes (loin, très loin, de Barbès).

• Digression éphémère: Connaissez-vous la bonne signification de l’expression « Zara Drip » ?

Mimétiser leur accent est presque tout un art (avec sa kyrielle d’artistes).

Parfois suave, souvent authentique, il est assez semblable à celui du petit bourgeois germanopratin.

L’éducation de la jeunesse dorée du pays du soleil couchant s’est souvent faite dans des établissements franco-français. (© Capture d’écran | Source gallica.bnf.fr / BnF | Cahiers des groupes Reconstruction / directeur-gérant Albert Detraz | Date: 1er mai 1956)

Le terme arabe « كيليميني » est la traduction idoine de ce phénomène socio-économique.

Dans les faits, ils ne correspondent pas entièrement à la caricature qui sert à les dépeindre.

Souvent confrontés au Bouzebal, sorte de Lacoste TN des Atlas, ils cherchent à tout prix à se distinguer avec leur habitus.

(© Capture d’écran | Source gallica.bnf.fr / BnF | Maroc monde : hebdomadaire catholique d’information marocaine et mondiale | Date: 10 février 1951)

Ainsi, vous les verrez souvent multiplier les anglicismes – voire même les hispanismes – à tout va, histoire de faire la démonstration de leur éducation d’élite.

Ce snobisme naturel n’est en rien de la pédanterie, mais bien un art de vivre.

Une façon d’être qui permet – à ceux qui ont l’oreille fine – de les reconnaître (et donc de les apprécier).

En tout cas, la kiliminosphère gagnerait à être plus populaire.

Au-delà du style, il s’agit là d’un idéal à atteindre: celui du nec plus ultra du raffinement et de l’élégance.

Les fils – et filles – à baba étant toujours à l’avant-garde du bon goût.